26 novembre 2013

Grandes Jorasses : un topo-guide d'anthologie

Connaissez-vous les “topos-guides” d'alpinisme ? Non ?

Ce genre littéraire – c'en est un, nous en sommes convaincus – consiste à rassembler les descriptions des itinéraires que les alpinistes ont parcourus sur les parois des montagnes. Les métaphores graphiques ne manquent pas : on “trace” une “nouvelle ligne” sur une face. Ces traits pointillés sur des photos ou des dessins peuvent sembler fort éloignés des aventures humaines vécues par ceux qui les ont suivis en vraie grandeur !


Un exemple de topo, tiré de CampToCamp, présentant des itinéraires de la face nord de l'aiguille du Midi (auteur : Thomas Charbonneau, voir à ce lien)

Détrompez-vous, la richesse de ces ouvrages, le luxe de détails qu'ils recèlent, peuvent en rendre la lecture passionnante. D'un point de vue graphique, avant tout. Il y a quelque chose d'artistique dans ces itinéraires. Nombre d'alpinistes capables d'imaginer, puis de parcourir, de telles lignes recherchent la perfection : tracé “direct”, tel un fil à plomb tombant du sommet, repérage des “lignes de faiblesses” – parfois bien “fortes” au demeurant –, découverte de tel ou tel relief caractéristique, face, éperon, pilier, arête, voire ces minuscules couloirs de glace éphémères que l'on appelle “goulottes”.

Le dernier topo-guide de JMEditions traite de la face nord des Grandes Jorasses.
Vous en aurez forcément entendu parler, ne serait-ce, pour les moins jeunes, que par le titre d'un livre de René Desmaison, 342 heures dans les Grandes Jorasses.
L'auteur, Julien Désécures, guide de haute montagne, nous livre ici une véritable encyclopédie de la face nord, tant géographique qu'historique, mais aussi technique, bien sûr, avec moult considérations sur la façon d'envisager de gravir ce mur de roc et de glace, y compris d'un point de vue météorologique.

Ci-dessus : la face nord des Grandes Jorasses et ses quatre sommets les plus repérables, pointes Walker, Whymper, Croz et Marguerite.

Car cette face alpine est exceptionnelle à tous égards. Très haute (jusqu'à 1200 m, soit trois tours Eiffel empilées), très large aussi (plus d'un kilomètre et demi), très difficile, très froide en raison de son exposition, elle a attiré tous les alpinistes de haut niveau, pour une longue histoire entamée dans les années 1930, et qui n'a cessé de se développer durant huit décennies…

Logiquement, on trouve dans ce topo un condensé de toute l'histoire de l'alpinisme, de la “conquête” (terme éminemment militaire !) aux parcours express (un alpiniste l'a gravie en 2h20 récemment), en passant par les grandes entreprises hivernales, les ascensions solitaires, voire les deux en même temps. Plus récemment, les praticiens experts ont été capables de découvrir des itinéraires, inédits ou pas, qui tirent tout le parti des techniques récentes de progression en terrain mixte (dry-tooling sur rocher et glace mêlés, “placages” de neige durcie collés sur la roche).

Qui dit histoire de l'alpinisme dit aussi acteurs de cette histoire. La face nord des Grandes Jorasses a inévitablement attiré tous ceux qui voulaient marquer d'une façon ou d'une autre cette histoire épique. Il serait fastidieux de citer tous les alpinistes célèbres qui ont sillonné cette face : ils s'y sont presque tous illustrés d'une façon ou d'une autre !

C'est ce que nous détaille le topo-guide de Julien Désécures.



Il nous montre que chaque relief de la face cache souvent une véritable montagne à lui seul. Ce qui, de face et de loin, ressemble à un simple éperon, est en réalité un ensemble massif à deux faces et une arête, dans lesquels circulent d'innombrables itinéraires – pas loin d'une cinquantaine au total !
Même si l'on sait que jamais, au grand jamais, on ne gravira aucun de ces itinéraires, prendre connaissance de leurs tracés, de leurs descriptions, de leur histoire suffit au plaisir du lecteur.
De nombreuses photos prises durant des ascensions de la face nous permettent d'imaginer l'ambiance – et les sensations qu'elle suscite – des lieux. De larges citations d'alpinistes ayant gravi cette face donnent du piment aux descriptions, tandis que des topos dessinés à la main – les œuvres “originales” – sont rassemblés en annexe.

Le blog de l'auteur donne un aperçu de la documentation ainsi rassemblée.

La connaissance de toutes ces lignes enrichit considérablement la contemplation d'une montagne. Un peu comme un plan d'architecte nous aide à comprendre les qualités d'un édifice, ou comme une partition musicale donne les clés de l'inspiration du compositeur. Les topos-guides d'alpinisme sont cependant beaucoup plus facile à lire que les critiques d'architectures (souvent élitistes) ou les partitions de musique (solfège oblige). Là où la difficulté commence, en revanche, c'est quand le pratiquant – ou le praticien, à votre guise – se trouve “au pied du mur”, et doit interpréter un croquis de 15 centimètres de hauteur résumant une ascension de plus de 1000 mètres…
Tout un art !

Grandes Jorasses, Face nord, North Face, bilingue français-anglais, par Julien Désécures, JMEditions 2013 - ISBN 978-2-918824-15-2

21 novembre 2013

Salon L'autre Livre - Paris

Du vendredi 15 au dimanche 17 novembre, les éditions AO étaient présentes au 11e salon des éditeurs indépendants, qui se tenait dans l'ancien marché des Blancs-Manteaux, rue Vieille du Temple.

L'association L'autre LIVRE, qui organisait le salon, n'avait pas ménagé sa peine, puisque plus de 140 éditeurs étaient représentés dans cet espace vaste et très bien situé en plein quartier du Marais. Que les organisateurs en soient remerciés.

Le tout dernier exemplaire du livre de Jean-Henri Maisonneuve, Tenir, les cris d'un prof de lettres, a trouvé preneur le vendredi, en la personne d'un… professeur de lettres. Et nous avons eu la surprise de le revoir le samedi en fin de matinée. Ayant lu le livre dans la soirée, cet enseignant a tenu à venir nous féliciter de l'avoir édité, tant il y avait retrouvé ses propres émotions et interrogations. Un bel hommage pour notre auteur pour marquer la fin de la commercialisation de son livre. Nous prévoyons d'ailleurs une réédition prochaine sous forme numérique afin de prolonger sa vie éditoriale.

Dimanche, trois auteurs AO sont venus nous rendre visite au stand et dédicacer leurs livres : Christine Rogier (Mercredeuils), Sébastien Haton (Demain le ciel sera orange) et Benoît Rousseau (Des Dômes et des hommes). En outre, Marie a assuré durant ces trois jours une présence assidue aux tables A65 et A67 qui nous étaient dévolues. Qu'elle en soit ici remerciée.



Nous avons également sympathisé avec nos voisins des éditions L'Épatante. Jean, dessinateur de presse, est aussi auteur et éditeur de livres d'humour sur le football ou le yoga, ainsi que d'albums graphiques tels que Les Beatles font l'intéressant. Un voisinage amusant et stimulant !


Quand un visiteur du salon a le regard attiré par la table d'exposition…


…qu'il se saisit d'un livre et en consulte la quatrième de couverture, la moitié du chemin est déjà parcourue.


Il reste à ce qu'il soit suffisamment intéressé pour accepter d'engager la conversation… Mais cela ne suffit pas toujours à ce que le livre lui soit vendu !
(Ces 3 clichés sont de Stéphane Assézat, que nous remercions ici).

Outre des amateurs de livres, nous avons noté combien ce salon attirait les visites de prestataires à la recherche de clients, que ce soit pour l'imprimerie, la révision de textes ou tout simplement des auteurs cherchant un éditeur, comme cet homme d'âge vénérable qui passait devant chaque stand, pointait son doigt sur l'exposant et lançait de but en blanc : “Vous ! Vous vous intéressez à la philosophie ??”

Un “autre” salon du livre, vivant et attractif donc, où la concurrence était néanmoins âpre, le rapport entre le nombre de visiteurs et le nombre de livres présentés devant être, somme toute, assez modeste. C'est la loi du genre !