L'une des étapes les plus délicates et importantes de l'édition d'un livre n'est autre que ce qu'on appelle la “révision-correction”. Contrairement aux idées reçues, elle dépasse largement la seule question de l'orthographe, en s'attachant aussi à la ponctuation, à la typographie et au style. Songez aux dialogues, avec leurs tirets, guillemets et autres subtilités ; à l'emplacement des virgules, parfois complexe ; aux points d'exclamation, d'interrogation et leurs espaces qui doivent rester insécables ; aux majuscules (capitales, celles-ci !), j'en passe et des meilleures (oui, au féminin, ces meilleures).
Après les multiples relectures d'un texte, il faut accepter… l'imperfection. Rien de plus vexant, après des centaines (voire des milliers) de corrections de laisser passer telle ou telle erreur, bien souvent parmi les plus simples à détecter, ce qu'une lectrice ou un lecteur vous fera remarquer, non sans cruauté.
Un exemple avec cet extrait d'un livre de la collection Totem (Gallmeister), une collection qui se distingue par la très grande qualité de sa conception, que ce soit les couvertures, la mise en pages, la typographie (très lisible). À la page 279 du roman 2034, une dystopie stratégique dramatique d'Elliot Ackerman et James Stavridis, on découvre la coquille “classique parmi les classiques” – je la corrige dans presque tous les textes des Éditions AO : la confusion entre la “tâche” (travail) et la “tache” (marque salissante). Une question de circonflexe, assez rétive aux correcteurs logiciels.
Mais il y a encore pire : lors de la réalisation de la couverture d'un livre, obnubilé par son équilibre graphique, ses couleurs, son ordonnancement, on en oublie parfois l'évidence, à savoir relire, vérifier, y compris le titre, que notre œil accoutumé corrige de lui-même tant nous l'avons en tête. C'est ainsi que je dispose d'un véritable collector avec cet exemplaire du roman désopilant de Donald Westlake, Comment voler une banque, l'un des nombreux épisodes de la série Dortmunder. Eh oui, disposé verticalement, le titre placé au dos d'un livre est propice aux fautes de frappe non identifiées… tout autant que les “gros titres” des journaux, pour des raisons voisines :
Le Monde étant certainement le quotidien le mieux relu de toute la presse, voilà qui nous rassure, en quelque sorte. Même les meilleurs peuvent avoir un instant d'inattention ! Conclusion : la perfection n'est pas de ce Monde (en italiques et avec une majuscule).

