Christine Rogier a publié son tout premier roman, Mercredeuils, trois flics face au destin, aux éditions AO à la mi-2011. En cette rentrée littéraire, voici que sort dans quelques jours La Cristaine, aux éditions Jacob-Duvernet. Les éditions AO sont heureuses de vous annoncer qu'une auteure qu'ils ont contribué à faire découvrir poursuive ainsi sa “route” d'écrivain (tout comme Jean-Henri Maisonneuve, dont nous avons chroniqué Vie Oxymore récemment).
La Cristaine est un témoignage. Nous ne sommes plus dans la fiction, mais dans la réalité la plus intime. Comment devient-on gardien de la paix, de surcroît quand on est une femme et que les affiches de recrutement proclament “un métier d'homme” ? Le livre tente de nous apporter des éléments de réponses, et c'est passionnant.
Le sous-titre, de ce point de vue, est réducteur. Plus que du “journal d'une fliquette”, il s'agit bien de la “genèse” d'une femme-flic. Le récit remonte en effet aux sources de l'enfance, et même plus loin dans le temps, dans la généalogie et ses influences décisives.
Christine Rogier a forgé son style d'écriture au fur et à mesure des années. Avec La Cristaine, nous sommes aux antipodes du récit factuel, et encore plus du style plat à l'anglo-saxonne ! C'est au contraire une avalanche d'images, de métaphores, de formules percutantes, un texte extrêmement dense en émotions, au vocabulaire riche, aux mots choisis avec délectation et rigueur en même temps. Des anecdotes ? Oui, on en trouve, mais magnifiées par leur description, sélectionnées avec parcimonie, principalement pour leur force symbolique. Comme le premier décès d'une femme-flic, annoncé pendant que Christine Rogier suivait son stage de formation initiale…
L'auteure clôt le livre sur un “fermez la parenthèse” ressemblant à une exhortation, presque un ordre ! Probablement parce que, comme elle le disait au tout début, “Se raconter, tenter de comprendre qui l'on est, d'où l'on vient, c'est un peu comme éplucher un oignon : ça finit toujours par faire chialer.” Juste après, non sans humour, la “Cristaine” n'hésite pas à reprendre une question tirée de l'Évangile : “Et vous, qui dites-vous que je suis ?” Il n'est pas certain que nous disposions de la réponse exacte – et c'est tout l'intérêt de ce texte de conserver sa part de mystère…
À la lecture de ce témoignage, on saisit encore mieux les raisons qui ont poussé l'auteure à écrire l'histoire de Mercredeuils, et surtout à lui donner cette tonalité à la fois sombre et lumineuse, renforcée par cette façon d'écrire bien à elle, qui nous avait tant plu à la lecture du manuscrit. La biographie et la fiction sont comme un miroir que l'on pourrait retourner pour découvrir de nouveaux reflets…
Mais, à propos, que signifie “La Cristaine” ? C'est le concentré de Christine (sans H, vous saurez pourquoi en le lisant) et de… capitaine (de gardiens de la paix). Voici comment cette auteure a choisi son surnom.
La Cristaine, journal d'une fliquette, éditions Jacob-Duvernet, sortie le 27 septembre 2012, 248 pages, 19,90 € - ISBN 978-2-847244-10-6. Pour consulter la fiche sur le site de l'éditeur, saisir le titre dans le champ de recherche (le lien direct n'affiche pas le cadre d'ensemble).